MOB Romande

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Association Suisse Romande de Reconstitution Historique 1898-1945

Les Patrouilles de Chasse 1944-2021

Publié par MOB-Romande sur 17 Septembre 2021, 13:18pm

L’équipe MOB Romande est heureuse de vous présenter un sujet bien spécifique, sur le plan historique mais également uniformologique. Nous avons pris beaucoup de plaisir à préparer et réaliser cet article qui, nous l'espérons, retiendra votre attention. 

Photo originale d'élements d'une Patrouille de Chasse, Nord-Vaudois, Septembre 1944

Photo originale d'élements d'une Patrouille de Chasse, Nord-Vaudois, Septembre 1944

La période 1939-1945 présente dans l'histoire militaire suisse, et notamment celle de son infanterie, un tournant important en termes d'approche, d'organisation et de tactique. L'infanterie classique reste nécessaire mais devient insuffisante pour mener à bien certaines missions. Sans parler de commandos ou de forces spéciales, la nécessité de disposer de petits groupes de soldats polyvalents, efficaces et rapides s'impose à l'état-major. 

Le premier exemple d’évolution est celui des compagnies de Pionniers d’Infanterie, embryon des futurs actuels Grenadiers.

Le 15 juillet 1942, lors d’une démonstration à la Schwägalp pour le Général Guisan ainsi que pour les attachés militaires, les premiers volontaires de la compagnie de pionniers d’infanterie du capitaine Matthias Brunner, commandant de la compagnie de fusiliers II / 80 étaient présentés.

Le succès et l’effet dissuasif de cette démonstration, mais surtout le fait que la conduite du combat moderne nécessite des équipes de choc particulièrement entraînées, a conduit le Général Guisan a décidé de mettre sur pied une telle compagnie dans chaque régiment d’infanterie dès fin 1943. 

Ce qui allait devenir nos unités de grenadiers actuelles se développèrent dès 1943 mais dans un cadre militaire encore bien traditionnel en termes de commandement  et de règlement. 

 

Patrouille de Chasse en progression dans le Nord-Vaudois, Septembre 1944
Patrouille de Chasse en progression dans le Nord-Vaudois, Septembre 1944
Patrouille de Chasse en progression dans le Nord-Vaudois, Septembre 1944
Patrouille de Chasse en progression dans le Nord-Vaudois, Septembre 1944
Patrouille de Chasse en progression dans le Nord-Vaudois, Septembre 1944
Patrouille de Chasse en progression dans le Nord-Vaudois, Septembre 1944
Patrouille de Chasse en progression dans le Nord-Vaudois, Septembre 1944

Patrouille de Chasse en progression dans le Nord-Vaudois, Septembre 1944

Le second exemple est à ce jour le seul qui au cours de la mobilisation de 1939-1945 présente une liberté novatrice dans la conduite des hommes, dans l'usage de l'équipement et d'une approche tactique s'approchant de la guérilla. 

Ce second exemple est Romand cette fois, ce sont les "Patrouilles de Chasse" du Major Chaudet. D’une certaine manière ancêtres des unités et détachement de reconnaissance modernes. 

Dès 1943, Tolochenaz, près de Morges, devient un des premiers centres de formation des nouveau Pionniers d’Infanterie. 

Dans un contexte d'encerclement total du pays et de possibles manœuvres offensives ou de retraite de la part de l’Allemagne, la violation de la neutralité du territoire Suisse reste fort probable. 

Ainsi, le Major Chaudet souhaite aller plus loin tactiquement afin de pouvoir contenir militairement des "débordements de frontière”. Paul Chaudet - futur Président de la Confédération - est à cette époque un jeune Major originaire des vignobles vaudois, il est pragmatique et prends bien conscience de la réalité de la guerre moderne. Remarqué par le Général Guisan, celui-ci appuie son initiative. 

 

1.Major Chaudet - 2.le Général Guisan et le Major Chaudet à Vaullion
1.Major Chaudet - 2.le Général Guisan et le Major Chaudet à Vaullion

1.Major Chaudet - 2.le Général Guisan et le Major Chaudet à Vaullion

Qu’est qu’une Patrouille de Chasse ? Une petite unité totalement indépendante qui agit sur les arrières ennemis. Elle vit pour elle-même, se nourrit par ses propres moyens et doit disposer de ravitaillement en vivres et en munitions, donc dissimulé à l’avance dans son secteur de combat. En cas de guerre, cette formation de combat doit pouvoir compter sur l'appui total, le soutien et le secret des civils qui la cachent. 

Un officer du Service de Renseignement en civil informe une patrouille des activités Allemandes de l'autre côté de la frontière, début Septembre 1944
Un officer du Service de Renseignement en civil informe une patrouille des activités Allemandes de l'autre côté de la frontière, début Septembre 1944
Un officer du Service de Renseignement en civil informe une patrouille des activités Allemandes de l'autre côté de la frontière, début Septembre 1944

Un officer du Service de Renseignement en civil informe une patrouille des activités Allemandes de l'autre côté de la frontière, début Septembre 1944

Le Major Chaudet charge le 1er Lieutenant Collomb - ou “Dany” pour ses hommes - de l'entraînement des patrouilleurs ainsi que de leur commandement. Ce que le Major Chaudet aura imaginé, le Lieutenant Collomb va le réaliser avec grand succès.


Dans ses mémoires de mobilisation, le Lt. Collomb écrit: “Pour être un patrouilleur efficace, il faut être un crack et avoir suivi les entraînements des troupes de choc - pionnier d'infanterie - en plus il faut avoir du coffre. Chaque compagnie - du 218 - avait détaché une dizaine d’hommes pour cet entraînement. (...) la marche rapide est une des conditions essentielles pour réussir une mission. (...) En plus de notre armement individuel, nous emportons notre ravitaillement, des explosifs, des moyens d’allumage, des grenades et de la munition en quantité. Le sac contenant le masque à gaz, vidé de son contenu, est une excellente musette toujours bien remplie.”

Lt. Collomb en 1944

Lt. Collomb en 1944

Parmis ces “cracks” il faut noter la présence étonnante d’anciens Légionnaires, dotés d’une expérience des combats et d’une formation solides.

Le Lt. Collomb écrit: “C’est comme à la Légion, nous confie le vieux Tonin, engagé volontaire à 17 ans. Il avait fait Verdun à l’autre guerre et nous en raconte quelques atrocités vécues, quand il a bu un verre, entre autres les “nettoyage de tranchées”. Après ces récits, nos gars aiguisent leur baïonnettes, qui deviennent si tranchantes que nous les utilisons pour couper le saucisson ou le pain”. 

 

Anciens de la Légion arborant par provocation leurs décorations
Anciens de la Légion arborant par provocation leurs décorations
Anciens de la Légion arborant par provocation leurs décorations
Anciens de la Légion arborant par provocation leurs décorations

Anciens de la Légion arborant par provocation leurs décorations

Ces patrouilleurs se font vite une réputation des deux côtés de la frontière. Au-delà de l'entraînement et des missions de frontière effectuées, les hommes du Lt. Collomb se font un nom, celui des “têtes de mort”.

C’est leur surnom dans le secteur, en effet, Collomb avait récupéré un modèle original d’insigne sur un uniforme allemand à la frontière. Plusieurs jeunes femmes de l'entourage des patrouilleurs en ont brodé de nombreux exemplaires. Les hommes de Collomb les portent fièrement brodées sur leurs épaulettes. Le Lt. Collomb écrit: “Nos apparitions aux postes frontières étaient toujours fort bien observées par les soldats du IIIème Reich. Ils posaient souvent des questions à notre sujet. Nos hommes répondaient invariablement la même chose: ‘patrouille de chasse ! ’...

Chef de Patrouille portant les épaulettes à "tête de mort" et un jeune patrouilleur
Chef de Patrouille portant les épaulettes à "tête de mort" et un jeune patrouilleur

Chef de Patrouille portant les épaulettes à "tête de mort" et un jeune patrouilleur

Bien des histoires et des récits furent heureusement consignés en détail par Collomb. Nous nous y sommes fidèlement basés. Leur lecture nous ont apporté un regard plus précis sur la qualité et l'excentricité de cette unité nouvelle. Loin de l’image traditionnelle d’une armée passive, retranchée au sein du Réduit Alpin, on y trouve l’exemple d’hommes volontaires, extrêmement bien entraînés, tactiquement innovateurs, anticipant un combat sur le sol national et s’y préparant activement. 

Nous espérons, au travers de cet article et de nos photos de reconstitution, vous avoir fait partager l’ambiance qui régnait dans les collines du Nord-Vaudois au cours de l’année 1944 et vous avoir intéressé !

 

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